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 Ginette RAPP (1928-1998) 

Ginette Rapp, femme solitaire et libre, fière de son indépendance et de ses choix, a passé une bonne partie de son temps à parcourir le monde, son monde. Ses carnets de croquis, de dessins toujours à ses côtés, infatigables compagnons intransigeants. Ginette Rapp dessinait, esquissait, prenait note de ces paysages qui l’envoûtaient et l’interrogeaient, à la fois source d’illumination et de réflexion. Allemagne, Angleterre, Amsterdam, île de Tinos, Hong Kong, Bulgarie, Iran, Broadway, Houston, Genève, Bretagne, Paris… Ses déplacements, voyages dans le temps et dans l’espace à la recherche non du temps perdu mais de celui, suspendu, de l’apaisement où la peinture s’exprime en toute simplicité, certes, mais avec véracité.

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Née le 24 décembre 1928, à Paris, elle fait ses humanités à l’Académie Julian, créée en 1866 par Rodolphe Julian, en partie pour recueillir les réfugiés (refuznik  !) des Beaux-Arts. Incroyable vivier d’artistes de renom – femmes et hommes –, entre la fin du XIXe siècle et le XXe siècle. En plus des nabis, cette formidable école accueillit notamment Jean Dubuffet, Marcel Duchamp, Jacques Villon, Fernand Léger ainsi qu’Henri Matisse, entres autres. Elle deviendra, quelques aléas plus tard, l’ESAG Penninghen.

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A cette époque, et les années suivantes, les toiles de Ginette Rapp peuvent rappeler certaines œuvres de Gauguin (« Woman By The dock At Yerske », Holland, « Les deux chèvres »…), Van Gogh (« Travaux aux champs », « Baie d’Audierne »…), Boudin, voire Courbet, un postimpressionnisme qui se cherche alors et se trouve parfois avec beauté. Ginette Rapp, elle, peu à peu dégage son style contre vent et marées, le peaufine, le construit par petites touches colorées, oranges, jaunes pétants, aplats ocres, bleus, légers ou profonds, c’est selon. Ce sont alors des plages où l’on joue, où l’on s’amuse avec légèreté autour des parasols chamarrés, de petites cabines de plage de guingois. Ce sont les vacances, le calme, la tranquillité des beaux jours. Des marchés, des étals, des scènes bucoliques, aussi. Des villes blanches ensuite, bâtiments cubiques superposés, enchevêtrés, abstractions sur la ville et, encore, ses interrogations. Un même traitement, que l’on se trouve à New York, Tunis ou Tanger, ou au Mexique, même sentiment d’irréalité, de tension, de scansion parfois car, si tout semble calme a priori, une inquiétude flotte que l’on a du mal à cerner mais qui est là. Dans cet imbroglio de structures enchâssées, encaissées, empilées affleure une subtile étrangeté. Là aussi couleurs vives des toits, blancheur aveuglante des murs, petites tâches de couleur éparses, éclaboussures, flaques, jets presque abstraits. Des ports aussi, Bretagne, Vendée, Pays-Bas, ailleurs encore, bien plus loin, ports de pêche, de plaisance, coques, mats et voiles au toucher, dansants, construisant des patchworks délicats, doux tons gris contrastant avec la vibration des blancs, plus présents et électriques. Des structures solides, presque rassurantes qui mettent les pieds sur terre alors que ça tangue drôlement. Toujours ces contradictions dans la composition, à la fois solide, ancrée et éthérée… Pesanteur de l’air chaud du Maghreb, densité et couleurs froides, presque fraîches plus au nord.

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Mais, dans ce beau travail de toute une vie se dégage un sentiment d’unité, de solidité, de ténacité et, bizarrement, de solitude, d’inquiétude, à la recherche de quelque chose encore.

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Ginette Rapp nous a quittés le 2 mai 1998, au cœur du printemps, pour un dernier et beau voyage, ses carnets de croquis à la main.

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Gérard Valat © O9/2017

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– Ginette Rapp a été primée de nombreuses fois  : 1958 - Prix Pacquement (les Amis du musée d’Art moderne)  ; 1977 - Prix Sophia Antipolis  ; 1980 - Prix de l’Isle-Adam  ; 1984 - Invitée d’Honneur au salon du Dessin et de la Peinture à l’eau.
– Elle a été notamment exposée  : depuis 1979 - Palm Beach, Phillips Galleries. 1981 - Houston, Phillips Galleries. 1981 - Nolan Raukin Gallery. 1988 - Noirmoutier, Galerie du Château. 1989 - Paris, Galerie Jean-Pierre Joubert. 1990 - Cannes, Galerie Gantois.
– Et en musée  : Paris, Musée d’Art Moderne. Royaume-Uni, Musée d’Aberdeen  ; Musée de Stoke-on-Trent. Achats Ville de Paris.

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